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LE PRÉSIDENT KONATÉ PEUT BIEN USER DE SON POUVOIR DE VETO...

LE PRÉSIDENT KONATÉ PEUT BIEN USER  DE SON POUVOIR DE VETO POUR SIGNER LE DECRET  DE VALIDATION DE LA CONSTITUTION APRÈS LECTURE  FAITE  PAR LE GOUVERNEMENT.

Principe : lorsque les techniques de révision de la constitution et les circonstances politiques l’exigent, le président de la république peut bien user de son droit de véto en matière de révision constitutionnelle sans passer par  le parlement ni par référendum.  Programmer un référendum dans la situation actuelle du pays est en pratique utopiste si l’on veut respecter le calendrier de la transition qui veut qu’on organise le premier tour de l’élection présidentielle le 27 Juin.

Avant de développer mon analyse sur la question du recours  au référendum, il convient de faire un petit résumé sur l’origine du problème juridique actuel. Lorsque les accords de Ouaga du 15  janvier 2010  prévoyait la mise en place  du CNT (conseil national de la transition), certains se sont précipités pour dire que cet organe doit être délibérant c'est-à-dire se prononcer avec voix délibérative sur certaine question de la transition. Si cela était bien fondé en droit, le CNT n’avait pour  autant aucune légitimité juridique pour réviser la constitution qui constitue le texte le plus sacré de la Nation. Dans la pratique  de la légitimité constitutionnelle, deux modes de révision existent en droit constitutionnel et ce sont : la révision par voie de référendum et celle effectuée par le parlement. A vrai dire les arguments qui soutenaient que le CNT avait la légitimité de réviser la constitution  étaient plus d’ordre politique que juridique.  Maintenant le CNT a révisé  la constitution et nous pouvons considérer ce travail comme un acquis communautaire. Il est évident que le CNT ne peut pas être l’organe qui révise la constitution et en même temps  la valide. Alors la question fondamentale est la suivante : Qui pourra valider la constitution après la révision faite par le CNT ? Faut-il obligatoirement  recourir au référendum avant les élections ?  Ce sont les questions que  je vais développer   maintenant afin d’éclaircir les principes de droit sur  ces questions.

I) LES PRINCIPES  DE RÉVISION CONSTITUTIONNELLE ET LES POUVOIRS DU PRÉSIDENT EN PÉRIODE TRANSITION

Selon l’article 91 de la loi fondamentale  suspendue par le CNDD, l’initiative de révision de la constitution appartient concurremment au président de la République et aux députés.

L’approbation par référendum rend définitive la révision.

Toutefois le président de la République peut décider de soumettre le projet de révision à  la seule assemblée nationale auquel cas il n’y a pas recours au référendum.

Voici en clair le contenu de l’article 91 de la constitution suspendue. Ce texte énonce clairement les deux modes usuels en matière de révision constitutionnelle à savoir le référendum et la voie parlementaire. A la lumière  de cette explication, il convient maintenant de s’interroger sur l’initiative de la révision qui détermine le mode de révision avant de montrer la spécificité de la situation politique et juridique  de notre pays.

Qui a demandé à ce qu’on révise la constitution ? Cette question mérite bien d’être posée et la réponse qu’on pourra donner  permettra de bien comprendre la situation actuelle. Je peux dire que c’est l’ensemble des composantes du pays et non sans désaccord qui ont demandé le toilettage des textes. Que ce soit au niveau des forces vives, de la société civile  et des partis politiques, des voix se sont toujours élevées pour dire qu’on ne va pas  aux élections sans faire le toilettage des textes. On entendait souvent d’ailleurs dans les milieux parisiens ‘‘on ne peut pas organiser des élections avec une constitution qui a été longtemps bafouée’’ ou bien ‘‘la constitution doit être révisée car celle qui existe a été taillée sur mesure par le président défunt’’. Ce même langage était souvent au menu des discussions au sein des forces vives en Guinée. Le principe de révision a été admis. Mais ni le gouvernement, ni le pouvoir exécutif ne pourra réviser. Voici comment le CNT s’est retrouvé avec la constitution pour sa révision et se comporte de facto comme un parlement légitime. A vrai dire on avait perdu de vue le côté exceptionnel de la situation politique de la Guinée car depuis le 23 Décembre 2008, notre pays n’a pas de parlement. Secundo la constitution qui était en vigueur  le 23 Décembre  a été  suspendue. Enfin nous sommes en période de transition qui ne peut durer éternellement.  Ni le président de la république, ni le CNT, ni le gouvernement n’a  pris l’initiative de révision par conséquent ne pourra  convoquer le peuple au référendum. Le mode de révision adopté  dans le cas de la transition peut être qualifié de technique. Une révision technique qui évite le recours à l’un ou l’autre mode de révision. Dans ce cas deux solutions me semblent être envisageables pour éviter le blocage  total qui ne sera  pas dans l’intérêt du peuple :

°) Le rétablissement de la constitution suspendue pour aller aux élections en laissant à celui qui viendra après les élections le soin de la réviser en présence d’un parlement légitime ;

°) La deuxième solution est que le président signe le décret de validation de la constitution révisée en vertu de son pouvoir de véto en période de transition et après lecture faite par le gouvernement. Cette deuxième solution est pratiquement bien fondée car les circonstances politiques l’exigent. Cela permet au président de s’opposer à la confusion que le CNT et le gouvernement sont entrain de créer dans le seul but de retarder la transition. Certains réclament vigoureusement aujourd’hui d’aller au référendum au nom de la souveraineté nationale, ils n’ont pas tort en principe. Mais le recours au référendum exige quelques préalables qui ne sont pas réunis et cela risque d’entrainer des conséquences graves. C’est à cela qu’il faut s’intéresser maintenant

II) LE RECOURS AU RÉFÉRENDUM  AVNT LA DATE DU SCRUTIN  RISQUE D’ENTRAINER DES CONSÉQUENCES GRAVES

Dans le lexique juridique, le référendum est défini comme étant le procédé de la démocratie semi-directe par lequel le peuple collabore  à l’élaboration de la loi qui ne devient parfaite qu’avec  le consentement populaire. Le référendum constituant est celui  qui porte sur l’adoption ou la révision d’une constitution. L’idéal dans une démocratie serait bien entendu la participation  du peuple à l’exercice de la souveraineté nationale. La souveraineté est définie par Carré de Malberg comme étant le pouvoir de droit originaire et suprême. Originaire en ce sens que c’est l’émanation du peuple. Suprême car aucun  autre pouvoir n’est au dessus du pouvoir souverain.  En tant que juriste je pose une et seule question aux intellectuels Guinéens : Où était cette souveraineté quand  le CNT, qui n’est pas l’émanation du peuple, avait eu l’aval pour réviser  la constitution dans le but de sa modification ? Cette souveraineté se trouve t-elle aujourd’hui pendant que le Gouvernement de Doré est entrain de porter gravement atteinte à l’intégrité territoriale constitutionnelle en négociant des engagements internationaux au nom du peuple et en l’absence de tout parlement légitime? La faculté de conclure des engagements internationaux est essentiellement un attribut de la souveraineté de l’État.

Je crois qu’à moment donné nous devons avoir le bon sens. Notre souhait est l’organisation des élections dans la paix et la transparence  afin d’offrir à la Guinée les moyens de ses ambitions politiques et économiques. Seules les

élections permettront à la Guinée  de retrouver  sa place dans le concert des Nations. Dans la situation actuelle, la Guinée n’a aucune crédibilité internationale. Le recours au référendum pourra avoir des conséquences  et entrainer  le retour à la case de départ ce qui serait inacceptable.

Les conséquences en cas de recours au référendum :

1)   La première conséquence du recours au référendum  est la prolongation des élections et le scénario ivoirien. Le président Konaté à bien montré qu’il est un homme de parole et qu’il a bien l’intention de respecter  l’engagement pris lors de la signature des accords de Ouaga c'est-à-dire l’organisation des élections le 27 Juin. Vue le temps qui reste  on ne peut raisonnablement soutenir  en pratique  qu’on pourra organiser  un référendum digne de ce nom avant d’aller aux élections ;

2)   Le référendum exige une stabilité politique. Or dans la situation actuelle de la Guinée, le pays n’est pas stable. La situation peut dégénérer à tout moment ;

3)    En cas de référendum, le peuple  pourra ne pas approuver la constitution révisée.  En cas d’approbation par le peuple, il n’y a pas de problème. En revanche  lorsque le peuple désapprouve la constitution,  le blocage est inévitable ce qui entrainera le retour à la case de départ ;

4)   Le référendum exige qu’on organise un débat  national dans le cadre d’une assemblée parlementaire ou dans différents milieux qui composent la nation (intellectuels, politiques, société civile, personnalité ressources et spécialistes en matière constitutionnelle). Mais le respect du calendrier de la transition  exige d’aller aux élections le 27 Juin. Le récent communiqué du Forum des forces vives est la preuve probante  que la majorité des guinéens n’acceptera pas un report  des élections pour quelque motif que ce soit.

Une transition perd son caractère transitoire quand elle s’éternise  dans le temps.

Vive l’unité nationale et que Dieu bénisse la Guinée

Kaba Lamine Chercheur en Thèse de Droit international à la Sorbonne


Lamine KABA

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