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La haine en héritage et la culture du mensonge
« Nous avons développé, durablement, une culture du mensonge, du faux et de la méchanceté, que nous nous sommes quasiment imposée à nous-mêmes. Nous avons nié et détruit en même temps tout ce qui avait fait notre singularité et notre grandeur aux yeux du Monde. Nous l’avons souvent fait avec une haine sourde et absurde, et avec détermination. » Aly Bocar Cissé
Depuis des années se transmet de façon héréditaire, notamment dans certaines communautés, la haine de Sékou Touré et de tous ceux qui lui reconnaissent du bien. Certains se sont approprié le sujet au point d’en faire un fond de commerce et un moyen de pression. Ils passent toute leur journée à parler de Sékou Touré ; et ne peuvent participer à aucun débat sans le nommer et l’accuser de tous les maux de ce pays. Il est même devenu leur source d’inspiration. Privez leurs de Sékou Touré et ils deviendront muets.
La haine peut fédérer, mais elle ne peut rien construire de durable, car elle s’autodétruit. Elle détruit toujours son propre réceptacle. Les haineux minimisent toujours leurs propres actions et amplifient celles des autres. L’attachement exagéré aux morts et au passé, ainsi que la rancune tenace, sont des signes d’une foi peu profonde dans la justice divine. Celui qui pardonne est toujours meilleur que celui qui ne pardonne pas. C’est bien d’évoquer la religiosité de nos ancêtres, mais c’est encore mieux de suivre leur trace. Le prophète (paix et salut soit sur lui), a pardonné à Abou Soufiane et sa femme Hindi, alors que cette dernière avait engagé un tueur à gage pour faire assassiner son oncle Hamza (dont le personnage apparaît dans le film « le messager ») puis, elle lui a arraché le foie pour le manger crû ; elle coupa le nez et les oreilles du défunt pour en faire un collier. Bien qu’Abou Soufianne soit le chef des mécréants de la Mecque, son domicile fut considéré par le prophète, pendant la conquête de la ville, comme un lieu d’asile, au même titre que la Kaba, pour quiconque s’y refugierait. Il pardonna à tous les mecquois comme le prophète Joseph (Youssouf) avait pardonné à ses frères qui l’ont abandonné dans un puits. C’est ce pardon qui a conduit cette femme à devenir une musulmane pieuse au point de mériter les bénédictions du prophète. Moralité : la rancune n’a pas sa place dans l’Islam. Sommes-nous capables d’un tel pardon ? A priori non.
Cependant, le Foutah s’est fondé sur des valeurs morales et religieuses, et non sur la haine, la subversion et l’ethnocentrisme. «…que la haine pour un peuple [une ethnie, un groupe social, ou un individu] ne vous incite pas à être injuste. » (Coran 5:8). Et Dieu ajoute : « Entraidez-vous dans l'accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. Et craignez Allah, car Allah est, certes, dur en punition ! » (C 5:2) «… si deux groupes de croyants se combattent, faites la conciliation entre eux. Si l'un d'eux se rebelle contre l'autre, combattez le groupe qui se rebelle, jusqu'à ce qu'il se conforme à l'ordre d'Allah. Puis, s'il s'y conforme, réconciliez-les avec justice et soyez équitables car Allah aime les équitables. Les croyants ne sont que des frères. Établissez la concorde entre vos frères, et craignez Allah, afin qu'on vous fasse miséricorde. » (C 49:9-10)
Alors, halte à la falsification, aux affabulations, aux mensonges et aux calomnies. Il n’ya jamais eu de charnier ou de fosses communes, ni de d’assassinats organisés et planifiés, encore moins de génocide sous son régime. Allons-nous refaire notre histoire ? Allons nous rebaptiser le ‘’Pont 8 Novembre’’ en ‘’Pont des pendus’’ ; le camp Camayenne en Camp Boiro ? Pourquoi ne pas appeler dans ce cas la Guinée « le pays des cimetières »? Nous ne pouvons pas effacer l’héritage historique commun. Nul n’a le droit d’effacer une page de l’histoire d’un peuple, car, dit-on, « un peuple sans histoire est un monde sans âme ». La Guinée ne doit pas se réconcilier seulement avec son présent et son futur, mais également avec son passé, pour retrouver enfin sa joie de vivre et sa fierté d’antan, ciment de l’unité nationale. Les écrits d’Aly Bocar Cissé, de Kaimba Condé, d’Abdoul Soumaoro, de Sidiki Kobelé Keita, et de bien d’autres, à qui je rends hommage, s’inscrivent dans cette réhabilitation de la vérité.
Quelque ce soit ce qu’on pourrait reprocher à Ahmed Sékou Touré, il est le père de l’indépendance et le premier président de la Guinée. Il était un panafricaniste convaincu, qui a œuvré pour la lutte de libération et d’émancipation de plusieurs pays d’Afrique et du monde. Il ne faisait pas partie de ces chefs d’Etat qui attisaient la flamme sur la case du voisin au lieu de l’éteindre. Il a été plus enclin à suivre la voie de l’austérité que celle du faste. Il n’a eu aucun compte bancaire étranger, ni en Suisse, ni ailleurs. Sa seule grande propriété connue au monde est la villa de Bellevue, encore confisquée par l’Etat guinéen. Il a vécu dans ce pays et pour ce pays, malgré les dérapages et les crimes qui ont dû être commis. Il a toujours œuvré pour l’unité nationale et panafricaine, prononçant le plus souvent ses discours en français, et rarement en langues locales. L’ancien président sud africain Nelson Mandela, qui a séjourné à Conakry, et son parti l’ANC ont obtenu son soutien diplomatique et financier. Des leaders africains comme Amilcar Cabral, Augustino Neto, Samora Machel avaient des passeports diplomatiques guinéens. Pour toutes ces raisons, le président Ahmed Sékou Touré mérite notre respect et notre considération, comme les autres pères de l’indépendance dans leur pays respectifs.
Mohamed Lamine SIDIBE
Mohamed Lamine SIDIBÉ
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